
Le Département de la Justice des États-Unis (DOJ) a intensifié ses efforts visant à révoquer la citoyenneté américaine de certains immigrants naturalisés, dans une démarche qui s’inscrit dans la continuité du durcissement de la politique migratoire amorcée sous l’administration Trump. Ce virage soulève aujourd’hui de vives inquiétudes chez les défenseurs des droits humains et les juristes.
Le DOJ affirme que sa priorité est de cibler les citoyens naturalisés ayant commis des crimes graves, notamment des abus des droits humains ou ayant fraudé durant le processus de naturalisation. Depuis 2017, cette politique s’est traduite par une augmentation notable des cas de « dénaturalisation ». Selon des chiffres publiés, les services de l’immigration (USCIS) ont sélectionné plus de 2 500 dossiers susceptibles de faire l’objet de procédures de révocation.
Parmi les 46,2 millions d’immigrants vivant aux États-Unis, environ 53 % ont acquis la citoyenneté par naturalisation. Ce durcissement des règles place donc des millions de citoyens dans une position juridiquement fragile, alors même qu’ils ont légalement obtenu leur statut.
De nombreuses voix s’élèvent pour dénoncer les risques de cette politique. Des juristes et défenseurs des droits civiques pointent du doigt des atteintes possibles au 14e Amendement de la Constitution, qui garantit l’égalité de traitement devant la loi. Ils évoquent également des dérives potentielles vers une révocation de citoyenneté motivée par des opinions politiques, notamment dans le cas de critiques des politiques de pays alliés, comme Israël.
Les critiques redoutent une insécurité juridique croissante pour les citoyens naturalisés, qui pourraient perdre leur citoyenneté non seulement pour des crimes graves, mais aussi pour des erreurs administratives ou des déclarations jugées inexactes au moment de la demande de naturalisation.
Alors que les cas de dénaturalisation étaient autrefois rarissimes et réservés à des situations extrêmes (tels que les anciens nazis ou les auteurs de fraudes massives), leur multiplication depuis 2017 marque un tournant inquiétant dans la conception même de la citoyenneté américaine.
Si la lutte contre la fraude et les crimes graves est un objectif légitime, plusieurs experts appellent à un encadrement plus strict de ces procédures, afin de ne pas ouvrir la porte à des révocations arbitraires, discriminatoires ou politiquement motivées. Pour beaucoup, la citoyenneté – une fois acquise – ne devrait pas être un privilège conditionnel, mais un droit inaliénable.