
<<En tant que Prêtre de l’église catholique et en méditant l’Evangile du 15e dimanche du temps ordinaire de l’année liturgique « C », j’ose partager avec vous cette réflexion en prenant appui sur le texte de l’Ev selon St Luc en son chapitre 10, les versets 25-37. Je trouve que c’est particulièrement référentiel, par rapport à la conjoncture qui est celle de notre Pays et le comportement indifférent, désinvolte de ses fils.
L’indifférence devient un péché contre la citoyenneté lorsqu’elle conduit à l’inaction face à l’injustice, à la souffrance d’autrui, ou au déni de la participation à la vie publique, par peur de mourir tandis que personne n’est à l’abri. Elle est une forme de péché par omission, où le citoyen, le chrétien manque à son devoir de s’engager au nom de la justice ou au nom de sa foi en Dieu pour le bien commun et de défendre les droits des autres.
En d’autres termes, l’indifférence peut être considérée comme un péché contre la citoyenneté lorsqu’elle se manifeste par : Ne pas réagir face à des situations d’inégalité, d’abus ou de violations des autres.
Ne pas s’engager dans les débats, les processus démocratiques et les actions collectives qui visent à améliorer la société, par peur d’être accusé, d’être diffamé. Privilégier ses propres intérêts au détriment de l’intérêt général et de la solidarité.
L’indifférence, en tant que péché contre la citoyenneté, affaiblit les liens sociaux, entrave le progrès de la société et nuit à la cohésion de la collectivité. Il est donc important que les citoyens, partie prenante de chaque institution publique ou privée, religieuse ou autres prennent conscience de cette dimension de l’indifférence et s’engagent activement dans la vie publique pour construire une société plus juste et solidaire.
Parfois l’indifférence peut être comparée a un cancer social, en métastase, car elle ronge les liens sociaux et compromet la cohésion d’un groupe, d’une communauté ou même d’une société; et finalement l’indifférence devient un “cancer pour la démocratie”. Elle se manifeste par un manque d’intérêt, de compassion ou d’empathie envers les autres, et peut entraîner l’isolement, la violence.
La manifestation actuelle de la violence est caractérielle de tout ce qui est en train de se passer dans notre Pays.
Elle se traduit par notre incapacité à nous mettre à la place de l’autre, à comprendre ses difficultés ou à ressentir de la peine face à sa souffrance. On ne le voit pas, on cherche à peine à prendre de ses nouvelles.
Elle peut conduire à l’isolement social, où l’on est forcé de rester coincé chez soi, où les individus se replient sur eux-mêmes et ne s’intéressent plus aux autres.
Face à des situations difficiles ou injustes, l’indifférence peut conduire à un déni de responsabilité, où chacun se défausse sur les autres et refuse d’agir.
Elle peut être un terreau fertile pour la violence, car elle permet aux agresseurs de passer à l’acte sans rencontrer de résistance ou de réprobation.
Elle affaiblit les liens sociaux et rend plus difficile la construction d’une société solidaire et fraternelle, où chacun se sent concerné par le bien-être des autres.
Pourquoi l’indifférence est-elle comparable à un cancer ?
Comme un cancer, l’indifférence peut se développer lentement et insidieusement, sans que l’on s’en rende compte au début.
Elle est en train de ronger à la manière d’un rat, les liens sociaux et détruire la cohésion sociale.
C’est un cas, devenu de plus en plus difficile à soigner, car elle nécessite notre prise de conscience individuelle et collective, ainsi qu’un changement profond dans nos mentalités.
Comment lutter contre notre maladie de l’indifférence ?
Je crois que nous devons commencer par encourager l’empathie et la compassion envers les autres, promouvoir les interactions sociales, l’entraide et la solidarité peut aider à lutter contre l’isolement, pour mieux combattre l’individualisme haïtien. Nous devrons parvenir à montrer que chacun a un rôle à jouer pour construire une société plus juste et plus humaine.
En permettant à chacun de s’exprimer et de se faire entendre on parviendra à lutter contre l’indifférence et l’injustice.
L’indifférence est un problème sérieux qui nécessite une attention particulière. En combattant l’indifférence, on peut construire une société plus humaine, plus solidaire et plus juste. Selon le blog de Bernard Devert, il est possible de lutter contre l’indifférence en mettant en avant la fraternité.
Comment l’indifférence peut-elle devenir, le péché commun de tout un peuple?
L’indifférence, initialement une attitude personnelle, peut se transformer en une “contamination” d’un peuple lorsque le désintérêt collectif pour le bien-être des autres, les problèmes sociaux, ou les injustices s’installent. Cela se manifeste par un manque de solidarité, une incapacité à se sentir concerné par la souffrance d’autrui, et une passivité face aux situations difficiles. Cette indifférence généralisée peut avoir des conséquences graves, favorisant l’injustice, la violence et la désintégration sociale.
L’indifférence généralisée mène à une perte de la capacité à ressentir de l’empathie pour les autres, à se mettre à leur place et à les soutenir. Cela conduit à un repli sur soi et à un manque de cohésion sociale.
A force d’indifférence, nous développons la tendance à blâmer les victimes des injustices plutôt que de chercher à comprendre les causes des problèmes et à agir pour les résoudre. L’indifférence peut nous porter a avoir l’attitude de « sauve qui peut », je ne veux pas me cibler, ma valise est toute prête, au cas où!
L’indifférence face à la violence et aux injustices conduit à leur banalisation, à leur acceptation comme faisant partie de la réalité. Cela peut rendre plus difficile toute action pour y remédier.
L’absence de réaction face aux inégalités et à la pauvreté permet à ces problèmes de perdurer et même de s’aggraver, créant un cercle vicieux.
L’indifférence se traduit souvent par un désengagement de la vie civique, un manque de participation aux décisions publiques, et une perte de confiance dans les institutions.
lorsqu’elle devient une norme sociale, elle peut avoir des conséquences dévastatrices pour un peuple, sapant les bases de la cohésion sociale, de la justice et du progrès.
“Quand la victime se trouve prise au piège des brigands et des indifférents à son sort, Dieu fait surgir un bon samaritain”.
Cette expression s’inspire de la parabole du Bon Samaritain dans la Bible. Cette parabole, racontée par Jésus, souligne l’importance de l’amour du prochain et de l’aide à autrui, même envers ceux qui sont considérés comme des ennemis ou des étrangers. Dans cette situation, le bon samaritain, un homme d’une autre ethnie, témoigne d’une compassion et d’une action concrète envers la victime, contrastant avec l’indifférence du prêtre et du lévite.
La parabole est une réponse à l’indifférence et à la question “Qui est mon prochain?”. Elle met en évidence que notre prochain est toute personne dans le besoin.
Le Bon Samaritain, malgré les préjugés et les dangers de la route, prend soin de la victime blessée et abandonnée.
La parabole nous enseigne que l’amour du prochain doit se traduire par des actions concrètes, même envers ceux que nous ne connaissons pas ou que nous considérons comme différents. La Victime, pour ce qui a trait à notre contexte, c’est Haïti. Les brigands qui lui ont volé tout ce qu’elle avait, qui l’ont tabassée et laissée 3/4 mort à terre, ce sont des fils, des natifs de ses entrailles.
Le bon samaritain, paradoxalement, ne peut pas provenir d’un éventuel ailleurs. D’autres catégories d’enfants du Pays devront se révéler, définitivement ce « bon samaritain » pour sauver la vie de maman, notre prochain à nous tous, victime de nos propres agressions.
Il nous faut arrêter d’attendre l’arrivée de l’aide d’un prochain venu de l’étranger, qui se soucie très peu de nous, qui est indifférent à notre souffrance. Nous sommes trop souvent dupés, à travers ces genres d’attentes, d’ailleurs. Nous avons l’obligation morale de nous révéler: « sauveurs de nous-mêmes », au Nom du Saint Libérateur.
L’expression “Bon Samaritain” est souvent utilisée pour désigner une personne qui vient en aide à quelqu’un dans le besoin, sans distinction. Nous avons incessamment appelé à l’aide et nous récoltons de la dérision, à travers l’envoi des troupes sous équipées, peu motivées, signes d’indifférence à peine voilée.
Voyons! Ne soyons plus dupes! Prenons d’autres moyens qui soient efficaces, désormais.
Que les enfants-bandits du Pays se décident, en fin à donner un nouveau souffle, qu’ ils font comme le PKK, en Turquie! Qu’ils déposent les armes, les détruisent pour ramener le Pays à une société de Paix comme avant!
Puissent les personnes morales et ce qu’il reste du Pays comme institution s’engagent pour le Pays, au Nom de Jesus-Miséricorde. La victime, gisant au bord de la route, c’est Haïti. Le prochain de la grande victime, ce sont ses enfants. Engageons-nous, enfin et pour de vrai.
Cette parabole et l’expression qui en découle nous rappellent l’importance de la compassion, de l’empathie et de l’aide à autrui, même dans des situations extrêmes. Ayons un peu de compassion, d’empathie pour le Pays, c’est notre Pays.>>
À travers cette méditation, ce prêtre nous livre une véritable déclaration d’amour à Haïti , douloureuse, mais essentielle. Il rappelle que l’indifférence est une complicité silencieuse, un poison lent qui désagrège toute nation. Haïti, aujourd’hui plus que jamais, a besoin de bons samaritains.Non pas venus de l’extérieur, mais nés de ses propres entrailles.Ce texte n’est pas un simple sermon. C’est une invitation à la responsabilité, à la conversion du cœur et à l’engagement concret.