
Le Ministère du Tourisme a publié une note officielle, pleine d’émotion et de lyrisme, après l’incendie dévastateur qui a ravagé l’Hôtel Oloffson dans la nuit du 5 au 6 juillet 2025. L’établissement, joyau de l’architecture gingerbread et monument vivant de la mémoire culturelle haïtienne, a été gravement endommagé. Pourtant, derrière les mots empreints de poésie et de consternation, beaucoup y voient un cri d’indignation masqué : celui d’un État qui pleure une perte qu’il n’a pas su — ou voulu — empêcher.
Depuis des années, des voix s’élevaient pour alerter sur la vulnérabilité des lieux patrimoniaux du pays, dont l’Oloffson. Situé dans une capitale où l’insécurité, l’abandon institutionnel et l’absence de politiques culturelles cohérentes règnent en maître, l’hôtel n’était pas seulement un symbole… il était aussi une cible facile.
Alors que le Ministère salue la mémoire du lieu et appelle à une « mobilisation nationale et transnationale », nombreux sont ceux qui dénoncent l’ironie d’une telle déclaration. Car la vérité est brutale : il n’existait aucun dispositif de protection spécial pour ce site emblématique, aucune politique de sécurisation réelle des trésors patrimoniaux en zone urbaine à haut risque. Laisser un monument aussi précieux livré à lui-même dans le chaos actuel de Port-au-Prince, c’était signer son arrêt de mort.
Le Ministère parle de « début d’un nouveau souffle » et de « flamme du patrimoine haïtien » qui ne s’éteint jamais. Mais en réalité, cette flamme vacille dangereusement à chaque négligence institutionnelle. On ne reconstruit pas le passé avec de belles formules. Il aurait fallu le protéger pendant qu’il vivait.
Désormais, ce n’est pas seulement l’Oloffson qui est en ruine. C’est aussi la crédibilité d’un ministère qui agit en spectateur du désastre, prompt à rédiger de belles notes quand les cendres sont encore chaudes, mais incapable de poser les actes nécessaires quand le feu couvait encore.